Le pari du gouvernement de réduire les tensions de recrutement selon le plan annoncé le 27 septembre dernier sera-t-il gagné ?
C’est par une politique d’incitation à l’embauche des chômeurs de “longue durée” qu’il souhaite relever le défi.
Comment ? En mettant à l’honneur les employeurs soucieux de contribuer à la formation des personnes en recherche d’emploi par le versement d’une aide exceptionnelle en cas de signature d’un contrat de professionnalisation avec ces dernières.
Afin de satisfaire à l’équation des intérêts des 3 personnes concernées par ce dispositif : Pôle emploi (l’Etat), les employeurs en recherche de personnel et soucieux de participer à la formation, les personnes en recherche d’emploi et de formation, le décret du 29 octobre 2021 vient fixer les modalités d'attribution de cette aide.
Ces dernières traduisent une volonté d’encadrement strict du dispositif afin d’éviter les abus et de préserver la personne en demande d’emploi qui souhaite se réinsérer dans la vie active dans une dynamique de formation professionnelle.
Voici les différentes conditions fixées afin de bénéficier de cette fameuse aide exceptionnelle.
Zoom sur le contrat de professionnalisation
Le contrat de professionnalisation a été institué par la loi du 4 mai 2004 et se destine à permettre aux jeunes de 16 à 25 ans, aux demandeurs d’emploi et aux bénéficiaires de certaines allocations ou contrats, d’acquérir une qualification professionnelle ou de compléter leur formation initiale au moyen d’une formation en alternance.
Le contrat de professionnalisation peut être un contrat à durée déterminée ou indéterminée. La qualification professionnelle obtenue peut être un diplôme, un titre ou une qualification reconnue.
Par l’instauration d’une aide en cas de signature d’un tel contrat, le gouvernement entend encourager les employeurs à participer à la formation de leurs potentiels futurs salariés, tout en privilégiant les demandeurs d’emploi de longue durée.
En effet, l’aide exceptionnelle instaurée s’appliquera dans un premier temps aux contrats de professionnalisation conclus entre le 1er novembre 2021 et le 30 juin 2022 avec des personnes âgées d'au moins 30 ans, répondant aux critères suivants :
En outre, et motif pédagogique oblige, le demandeur d’emploi doit :
L'aide concerne également les contrats de professionnalisation expérimentaux de la loi Avenir professionnel. Il s’agit de contrats, qui par dérogation, permettent d'acquérir des compétences définies par l'employeur et l'opérateur de compétences, en accord avec le salarié.
Le gouvernement envisage pour les contrats de professionnalisation conclus entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2022, d’abaisser l'âge des demandeurs d’emploi à 26 ans pour élargir l’application de ce dispositif d’aide.
L’acquisition de l’aide exceptionnelle se fait à la première année d’exécution du contrat de professionnalisation.
Un maximum de 8 000 € est fixé sans plus de détails sur l’individualisation pour chaque situation.
En revanche, cette aide n’est pas additionnée aux autres dispositifs en la matière, le décret prenant le soin de préciser qu’elle se substitue pour les contrats conclus entre le 1er novembre 2021 et le 31 décembre 2022 à :
L'aide financière est gérée par Pôle emploi pour le compte de l’État.
Pour bénéficier de l’aide, le contrat doit être déposé par l'opérateur de compétences (Opco) auprès du ministre chargé de la formation professionnelle. Ce dernier adresse par voie dématérialisée à Pôle emploi les informations nécessaires au paiement de l'aide pour chaque contrat remplissant les conditions.
La signature d’un contrat de professionnalisation par un employeur devant systématiquement être déposé auprès de son Opco, ce dernier servant d’intermédiaire auprès de pôle emploi, il faut souligner le soin pris par le gouvernement de ne pas mettre à la charge de l’employeur des formalités supplémentaires dans le cadre de cette aide.
L’aide est ensuite versée le premier mois suivant la transmission de la décision d'attribution à l'employeur bénéficiaire, puis tous les trois mois dans l'attente des données mentionnées dans la DSN effectuée par l'employeur ou à défaut, après réception des bulletins de paie du salarié transmis par l'employeur. À défaut de transmission de ces données, l'aide est suspendue.
Par ailleurs, en cas de rupture anticipée du contrat, l'aide n'est pas due à compter du mois suivant la date de fin du contrat. Tout comme en cas de suspension du contrat conduisant au non-versement de la rémunération par l'employeur au salarié en contrat de professionnalisation, l'aide n'est pas due pour chaque mois considéré.
Ainsi le dispositif, certes très encadré, a le mérite de récompenser les employeurs ayant une démarche pédagogique et de favoriser la réinsertion des demandeurs d’emploi en quête de savoir-faire.
Le demandeur d’emploi est également récompensé par le versement d’une aide exceptionnelle de 1 000 € lorsqu’il bénéficie d’une proposition d’emploi dans une entreprise et qu’il est formé dans le cadre d’une Préparation opérationnelle à l’emploi individuelle.
Elle n’a pas pour destinée de féliciter le demandeur d’emploi qui accède de nouveau à un emploi mais sert de levier financier pour les personnes les plus éloignées souvent confrontées à des difficultés matérielles qui les freinent pour revenir dans le monde du travail. Nous pouvons toutefois rester dubitatifs sur la finalité proclamée puisque l’aide fait l’objet d’un premier versement, de 50 % dans le mois suivant l’entrée en formation (qui doit intervenir entre le 1er novembre 2021 et le 31 décembre 2022) et le restant est versé à l’issue de la formation.
Difficile à ce jour d’émettre un avis sur les répercussions que le dispositif pourrait avoir, tant les crispations et la rudesse économique instaurée par la crise sanitaire sont encore palpables.
Il n’en demeure pas moins que le taux de conclusion de contrat de professionnalisation ayant chuté de 48% sur l’année 2020 (113 000 contrats contre 219 000 en 2019), la courbe devrait dans tous les cas s’inverser sur les années à venir.
Reste que le taux de conversion de ce type de contrat en emploi durable est inférieur à 50% (47% exactement selon DARES ANALYSES) ce qui laisse sous-entendre une efficacité limitée qui ne saurait résoudre les grands enjeux sociétaux que sont le chômage, la formation et l’économie. C’est certain, le gouvernement a encore du pain sur la planche !