Harcèlement moral : nouvelle illustration du partage de la preuve

Article Rédigé par anne-lise Castell
Publié le 22 avril 2024

Dans une décision du 4 avril 2024, la Cour de cassation a rappelé qu’un salarié qui s’estime victime de harcèlement moral n’a pas à prouver tout seul le harcèlement. Il doit seulement présenter des premiers éléments et c’est ensuite à l’employeur d’y répondre afin que le juge tranche. Le fait de s’être vu fixé un rendez-vous par son employeur pendant son arrêt maladie constitue bien un élément à examiner.

L’employeur et le salarié se partagent la preuve du harcèlement moral

Un salarié victime de harcèlement moral dispose d’un délai de 5 ans pour saisir le conseil de prud’hommes et demander réparation.

Mais bien souvent les salariés hésitent à agir et ne savent pas quels éléments de preuve apporter.

Il faut savoir qu’un salarié n’a pourtant pas à tout faire. Il doit :

  • simplement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ;
  • et c’est ensuite à l’employeur d’y répondre en prouvant que ces agissements étaient justifiés par des éléments objectifs rendant  sa décision étrangère à tout harcèlement.

Aux juges ensuite de trancher sachant qu’ils doivent examiner tous les faits invoqués par le salarié.

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Voici quelques exemples d’éléments que le salarié peut invoquer : échanges de mails ou SMS, courriers, compte-rendus de réunion ou d’un entretien d'évaluation, certificats médicaux, témoignages ou attestations, absence de réactivité de l’employeur suite à un signalement…

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Illustration avec le cas d’un salarié convoqué à un rendez-vous pendant son arrêt maladie

Cette affaire concernait un salarié qui a eu plusieurs arrêts maladie et a fini par se suicider. C’est son épouse qui agit pour faire reconnaître le harcèlement moral qu’il aurait subi.

Demande rejetée par la cour d’appel qui estime :

  • que la lecture des courriels échangés pendant les arrêts de travail sont empreints de compassion et n'avaient pour objet qu’une reprise du travail dans les meilleures conditions ;
  • que les pièces médicales versées aux débats, si elles décrivent une souffrance au travail qui ne peut être niée, ne sont que la restitution des déclarations faites par le salarié aux professionnels de santé. lI n’y a pas de témoins directs de faits précis caractéristiques de harcèlement moral ;
  • seule la diffusion, de la vacance du poste occupé par le salarié, qualifiée d'erreur par la société, est de nature à caractériser un acte de harcèlement moral, mais il s’agit d’un fait isolé.

Rappel :  Le harcèlement moral se définit comme le fait pour le salarié :

  • de subir des agissements répétées ;
  • ayant pour effet ou pour objet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (C trav., art. L. 1152-1).

Mais la Cour de cassation rappelle qu’il faut examiner tous les éléments de faits. Ici un élément a été oublié et aurait dû être examiné par la cour d’appel  : le fait d'avoir fixé au salarié un rendez-vous dans le hall d'un hôtel durant son arrêt maladie par lettre recommandée avec avis de réception.

Il fallait aussi apprécier si les éléments médicaux relevant la souffrance au travail du salarié, pris dans leur ensemble avec les autres éléments de fait, permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral. Et si oui étudier les réponses de l’employeur.

L’affaire sera donc rejugée.

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Références
  • Cour de cassation, chambre sociale, 3 avril  2024, pourvoi  n° 23-11.767
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