Les salariés qui se sentent en danger ont la possibilité, sous certaines conditions, d’utiliser un droit de retrait et interrompre leur travail. Mais souvent, les salariés ne savent pas dans quel cas il peut vraiment être utilisé. Les décisions de justice à ce sujet, qui nous donnent des exemples concrets, sont donc précieuses. Illustration avec une décision du 27 mars 2024.
Le droit de retrait c’est la possibilité pour un salarié de quitter son travail (=”se retirer”) quand il se sent menacé. Sans avoir à obtenir l’accord de son employeur. Et cela dure jusqu’à ce que l’employeur ait pris des mesures de protection adaptées pour mettre fin à la situation dangereuse.
Aucune forme n’est imposée pour exercer son droit de retrait, l'important c’est de prévenir l’employeur. Un écrit reste toutefois conseillé en indiquant les raisons de son retrait.
Exercer son droit de retrait ne signifie pas rentrer chez soi. Le salarié doit se tenir à la disposition de son employeur.
Le droit de retrait nécessite que le salarié pense que la situation de travail dans laquelle il se trouve présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé.
Pas besoin que ce soit vraiment le cas au final mais il faut un motif raisonnable pour le penser au moment où on se retire.
Concrètement il faut donc :
Attention, si l’utilisation du droit de retrait est justifiée, le salarié ne subira aucune perte de salaire. Mais dans le cas contraire, l'employeur n'a pas à le rémunérer et peut même selon les circonstances envisager une sanction. Avant d’exercer son droit de retrait, il faut aussi s’assurer de ne pas créer pour les autres une nouvelle situation de risque grave et imminent.
La difficulté principale c’est de définir quand la croyance du danger est raisonnable car c’est très subjectif. Il faut tenir compte de la situation bien sûr mais les connaissances du salarié, ses compétences peuvent aussi entrer en ligne de compte.
Au final, les juges vont décider au cas par cas.
La Cour de cassation nous a fourni un exemple récent le 27 mars dernier. Il s’agissait d’un steward qui a fait valoir son droit de retrait pour certaines destinations du fait du contexte international (la rupture du cessez-le-feu entre Israël et la Palestine et d'intenses tirs de roquette, notamment depuis la bande de Gaza).
La cour d’appel rejette sa demande en soulignant :
Mais la Cour de cassation rappelle qu’il importe peu qu’un tel danger existe ou non. Ce qu’il faut rechercher, c’est si le salarié a un motif raisonnable pour le penser au jour où il se retire et ici la cour d'appel ne l’a pas fait.
A toutes fins utiles, voici quelques exemples de décisions sur le droit de retrait. Son utilisation a été jugée justifiée lorsque :
A l’inverse, son utilisation a été jugée injustifiée lorsque :
Si l’utilisation du droit de retrait est facultative pour un salarié, ce dernier a par contre l'obligation de signaler immédiatement à l’employeur toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection (C. trav., art. L 4131-1).
Quand un salarié souhaite utiliser son droit de retrait, il est important qu’il vous prévienne. Car vous pourrez non seulement l'aider à évaluer la situation mais aussi lui rappeler qu’il faut signaler tout danger grave et imminent. En tant qu’élu vous disposez également d’un droit d’alerte en cas de danger grave et imminent. Toute alerte déclenchée va être consignée par écrit sur le registre des dangers graves et imminents. Une enquête va également se déclencher conjointement avec l’employeur. Pour en savoir plus sur le droit d’alerte du CSE, Qiiro vous propose une fiche pratique et un modèle de courrier. L’équipe Qiiro se tient également prête à répondre à toutes vos questions via l’offre d’accompagnement juridique.