Tout savoir sur l’accompagnement d’un salarié convoqué à un entretien préalable

Article publié le 3 juin

Tout d’abord, remettons les choses dans leur contexte. Lorsqu’un salarié est convoqué à un entretien préalable à sanction ou à licenciement, quel peut bien être le rôle du CSE ? Après tout, il n’est pas un cogestionnaire de l’entreprise et ne prend pas part directement aux décisions RH… Et pourtant, la loi prévoit bien une possibilité essentielle : un salarié peut se faire assister par un membre du CSE lors de cet entretien. 

Ce droit, parfois méconnu ou sous-utilisé, constitue pourtant un levier concret de soutien aux salariés confrontés à une situation délicate. Le rôle du CSE dans l’accompagnement des salariés est bien réel et fondamental dans certaines procédures disciplinaires ! Mais alors, en quoi consiste précisément cette mission d’assistance ? Et comment l’exercer efficacement ? 

Pour jouer pleinement votre rôle de représentant du personnel dans ces circonstances, il est indispensable de comprendre le cadre légal, le déroulé de l’entretien et la posture à adopter pour être un soutien, sans vous mettre en difficulté. 

Cette fiche pratique vous propose un tour d’horizon clair et accessible pour bien appréhender l’assistance à un entretien préalable : droits, étapes, bonnes pratiques et pièges à éviter ! 

Comprendre le cadre de l’entretien préalable 

Pour bien accompagner, il faut d’abord comprendre le pourquoi et le comment de cette procédure. 

À quoi sert un entretien préalable ? 

Un entretien préalable est une garantie mise en place par le Code du travail en faveur du salarié. Il constitue dans la plupart des cas une obligation légale. C’est la première étape obligatoire dès qu’une sanction disciplinaire est envisagée, et ce quels que soient : 

- l’effectif de l’entreprise ; 

- l’ancienneté du salarié ; 

- ou la nature des faits reprochés. 

L’absence de convocation à cet entretien ou même l’absence d’une des mentions obligatoires dans la lettre de convocation à l’entretien préalable peut rendre la procédure de sanction disciplinaire irrégulière. 

Le salarié reste libre de s’y rendre ou non. Cependant, comme la plupart des règles instaurées dans le monde du travail, l’objectif de l’entretien préalable est d’instaurer un dialogue social même dans des situations délicates. Les explications du salarié sont nécessaires afin que l’employeur puisse prendre une décision en toute connaissance de cause. Parfois, une explication, un échange ou même un regard peuvent suffire à changer la perspective de l’employeur. 

Dans quels cas est-il obligatoire ? 

L’entretien préalable n’est pas systématiquement obligatoire. 

En effet, lorsque la sanction disciplinaire est considérée comme légère, l'employeur peut appliquer une procédure allégée dite “simplifiée”. Il est alors tenu uniquement d’adresser au salarié une lettre précisant les griefs retenus contre le salarié dans un délai maximum de 2 mois après les faits fautifs. 

Les sanctions qui relèvent d’une telle procédure sont celles qui sont sans incidence sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié concerné. C’est l’exemple type de l’avertissement ou du blâme. 

En revanche, si un avertissement ou un blâme risque d’avoir un impact sur la présence du salarié dans l’entreprise ou sur l’évolution de sa carrière, alors l’entretien préalable devient obligatoire. 

Finalement, tout dépend des conséquences que la sanction peut avoir sur la situation du salarié dans l’entreprise. 

Quant à la sanction disciplinaire “lourde”, celle-ci oblige l'employeur à procéder à un entretien préalable et à notifier la sanction au salarié dans le délai maximum d'un mois suivant cet entretien préalable.

La procédure des sanctions lourdes s’applique pour : 

- la mise à pied ; 

- la mutation disciplinaire ; 

- la rétrogradation ; 

- toute mesure qui a une incidence sur la rémunération, les fonctions, la carrière ou la présence du salarié dans l'entreprise. 

Attention : il sera important à ce stade, et même bien avant, de prendre connaissance du règlement intérieur de l’entreprise, s’il y en a un, et de la convention collective applicable afin d’être en mesure de vérifier si la procédure de sanction a bien été appliquée correctement par la Direction. En effet, il se peut que ces documents octroient des garanties supplémentaires à celles prévues par les dispositions légales, notamment rendre obligatoire l'entretien préalable pour toutes les sanctions, y compris les plus faibles. 

Quels sont les droits du salarié à cette étape ? 

Le salarié n’est pas obligé de se rendre à l’entretien préalable, mais il est vivement conseillé de le faire, notamment pour clarifier les faits et faire entendre sa version. 

Il est à noter que cela n’aura aucune incidence sur la procédure qui peut se poursuivre sans lui. En effet, il ne s’agit ni d’une faute, ni d’un motif de licenciement. 

Rappelons que l’entretien préalable est une garantie offerte au salarié à laquelle il peut, s’il le souhaite, renoncer. 

Par ailleurs, l'entretien préalable peut être reporté à la demande du salarié (même si l’employeur est en droit de refuser). Cela peut lui permettre de préparer sa défense plus sereinement, par exemple en échangeant avec un élu du CSE. 

L'employeur peut, lors de l'entretien préalable, se faire accompagner par : 

- un cadre ; 

- un supérieur hiérarchique du salarié concerné par la procédure ; 

- la personne qui a constaté la faute ; 

- ou encore le juriste salarié de l'entreprise. 

Cependant, la présence de l'assistant de l’employeur ne doit pas être préjudiciable aux intérêts du salarié et détourner l'entretien de son objet. A défaut, cela ouvrirait doit pour le salarié à des dommages et intérêts. Donc non : l’employeur ne peut pas se faire assister par un salarié victime des faits reprochés au salarié convoqué. Cela détournerait l’entretien de son objet et le transformerait en enquête, ce qui serait contraire à l’exigence d’impartialité. 

Important : l’employeur, tout comme le salarié, ne peut être accompagné que par une seule personne. Cela garantit un équilibre entre les parties et évite toute pression excessive.

De plus, le salarié bénéficie d'une immunité concernant les propos tenus au cours de l'entretien préalable, sauf s’il y a un abus (injure ou diffamation par exemple).

Et surtout, le salarié peut se faire assister par un élu du CSE de son choix, un droit essentiel trop souvent sous-estimé. 

Le droit à l’assistance : un droit fondamental

Qui peut assister le salarié ? 

Lors de l'entretien préalable, le salarié peut se faire assister. C'est à lui, et à lui seul de choisir la personne qui l'assistera au cours de son entretien. En aucun cas l'employeur ne pourra imposer la présence d'un élu membre du comité si le salarié convoqué ne le souhaite pas. 

La liste des personnes pouvant l’assister variera selon que l’entreprise dispose ou non d’un CSE. 

À savoir : l’existence d’un CSE s’apprécie au niveau de l’entreprise, et non de chaque établissement. De plus, si l'entreprise appartient à une unité économique et sociale (UES), le salarié peut aussi être assisté par une personne appartenant à une autre entité de cette UES. 

→ Dans les entreprises dotées d’un CSE : 

Le salarié peut se faire assister par toute personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise : 

- un représentant du personnel ; 

- ou tout autre salarié de l'entreprise (un collègue, un manager, etc.). 

Par ailleurs, il est essentiel de préciser que le CSE ne peut confier le rôle d’assistance à un ou plusieurs élus du CSE, et même en l’inscrivant dans son règlement intérieur. Tous les élus possèdent cette attribution. Le salarié doit pouvoir être libre de choisir la personne qu’il souhaite. 

→ Dans les entreprises dépourvues de CSE : 

Le salarié peut se faire assister : 

- soit par un membre du personnel de l'entreprise ; 

- soit, uniquement en cas de procédure de licenciement, par un conseil extérieur inscrit sur une liste dressée par le préfet du département. 

A noter : pour les autres sanctions disciplinaires, le salarié ne peut pas faire appel à un conseiller extérieur. Il doit se faire assister uniquement par un membre du personnel de l’entreprise.

Important : lorsque la procédure de licenciement concerne le seul élu du CSE de l'entreprise, il sera nécessaire d'appliquer les modalités d'assistance du salarié prévues dans les entreprises dépourvues d’un CSE. 

Comment le salarié doit-il informer son employeur ? 

Le Code du travail n’impose pas de formalités strictes pour informer l’employeur de la présence d’un assistant. Toutefois, pour des raisons de bonne organisation et de transparence, il est fortement recommandé que le salarié :

- prenne rapidement contact avec la personne choisie pour vérifier sa disponibilité à la date prévue ; 

- informe l’employeur dès que possible, par tout moyen (écrit de préférence), de sa volonté de se faire assister et de l’identité de la personne qui l’accompagnera. 

Cela permet à l’employeur de préparer l’entretien dans un cadre serein et équitable, notamment si une salle spécifique ou la présence d’un autre interlocuteur RH est nécessaire. 

À noter : le salarié n’a pas à justifier son choix, tant que la personne choisie respecte les conditions fixées par la loi. 

Le rôle du membre du CSE pendant l’entretien

Que peut faire le membre du CSE ? 

Voyons maintenant ce que peut faire concrètement le membre du CSE désigné par le salarié pour l'assister lors de l’entretien préalable. 

Il a pour mission principale d’assister et de conseiller le salarié comme prévu dans le Code du travail. 

Le membre du CSE ne remplace pas un avocat, mais il joue un rôle actif pour aider le salarié à s’exprimer et à faire valoir sa version des faits. Plus concrètement, il peut notamment : 

  • donner un avis objectif sur les faits ; 
  • compléter les éléments apportés par le salarié si nécessaire ; 
  • poser des questions à l’employeur en cas de flou ou de contradiction ; 
  • reformuler les propos du salarié ou les rappeler si celui-ci est en difficulté. 

Enfin, il peut aussi rédiger un témoignage écrit sur le déroulement de l’entretien, ce qui peut s’avérer très utile en cas de contentieux devant le conseil de prud’hommes. 

Quels sont les droits du membre du CSE ? 

Afin de mener à bien sa mission d’assistance, le membre du CSE bénéficie de plusieurs droits reconnus par le Code du travail. 

Tout d’abord, l’employeur doit permettre à la personne choisie par le salarié de s’absenter de son poste pendant le temps nécessaire à cette mission. La loi ne prévoit aucune obligation pour l’assistant d’informer préalablement l’employeur de son absence. Toutefois, pour des raisons évidentes d’organisation ou de sécurité, il reste recommandé de prévenir sa hiérarchie. 

Le temps passé à l’entretien est considéré comme du temps de travail effectif. Il n’est pas nécessaire d’utiliser son crédit d’heures de délégation pour accomplir cette mission. Le membre du CSE, qu’il soit titulaire ou suppléant, ne peut pas être privé de salaire pour le temps passé à accompagner un salarié à un entretien préalable.

C’est un droit. C’est donc une vraie mission de représentation qui mérite toute l’implication nécessaire, sans crainte de répercussion sur la rémunération. 

Le membre du CSE peut également demander le remboursement de ses frais de déplacement ou de repas liés à l’entretien. 

Enfin, les élus du CSE ont droit à une formation économique, sociale, environnementale et syndicale. C’est l’occasion idéale pour se former à ce rôle d’assistant du salarié, comprendre les enjeux de la procédure disciplinaire et gagner en assurance lors de l’entretien. Une corde essentielle à ajouter à son arc ! (voir notre fiche guide Tout savoir sur la formation économique). 

Comment adopter une posture juste ? 

En tant que membre du CSE, vous avez une double casquette : 

- vous représentez les salariés de votre entreprise ; 

- et vous êtes un acteur du dialogue social. 

Ce rôle vous place dans une position clé, surtout lorsque vous accompagnez un salarié à un entretien préalable. 

Dans ce contexte, votre posture compte autant que vos connaissances. 

→ L’écoute active est fondamentale : 

Il ne s’agit pas simplement d’entendre le salarié, mais de réellement écouter ce qu’il dit et aussi ce qu’il ne dit pas. Reformulez ses propos pour vérifier que vous avez bien compris, posez des questions ouvertes, montrez que vous êtes pleinement présent. Vous ne devez pas “résoudre” le mauvais problème à cause d’un malentendu ou d’une écoute distraite. 

Bon à savoir : QiiRO propose une formation SSCT (santé, sécurité et conditions de travail) qui inclut des techniques d’écoute active. Un vrai plus pour affiner votre posture ! (voir notre fiche guide Tout savoir sur la formation SSCT). 

→ Restez objectif : 

Votre rôle n’est pas de juger ni de prendre parti aveuglément. Si le salarié a effectivement commis une faute, il faut pouvoir le reconnaître tout en maintenant une posture constructive. L’important, c’est de veiller au respect de ses droits et à l’équilibre de l’échange. 

→ Gardez une posture de soutien bienveillant :

Le salarié vous a choisi pour l’assister, et peut être dans un moment difficile de sa vie professionnelle. Votre présence seule est déjà un appui. Vous êtes là pour lui permettre de ne pas affronter seul la situation, pour l’aider à garder ses repères et pour garantir que la procédure reste équitable. 

→ Soyez discret : 

Le rôle d’assistance implique aussi une confidentialité naturelle. Ce qui se dit lors de l’échange reste entre les parties concernées, sauf accord explicite. 

En résumé : écoutez, soutenez, mais restez lucide. Vous êtes un point d’ancrage dans un moment où le salarié peut se sentir vulnérable. 

Quels documents et informations préparer en amont ? 

Avant l’entretien, il est essentiel de faire un état des lieux clair avec le salarié. Ce temps d’échange en amont est précieux : il permet de comprendre le contexte, les faits reprochés, la version du salarié et de commencer à bâtir une stratégie d’assistance. 

Lors de ce premier entretien, aidez le salarié à : 

  • retracer les faits dans l’ordre chronologique ; 
  • exprimer sa version avec ses propres mots (sans minimiser ni dramatiser)
  • qualifier les faits (essentiel pour résoudre le problème !) ; 
  • identifier les éléments de preuve ou de contexte utiles à apporter. 

Voici quelques exemples de documents ou d’éléments que le salarié peut réunir : 

  • des échanges d’emails ou de messages (SMS, messagerie interne) ; 
  • des témoignages écrits de collègues, clients, supérieurs hiérarchiques ; 
  • des documents de travail (fiches, consignes, plannings, etc.) ; 
  • des notes personnelles sur des faits ou comportements récurrents ; 
  • et bien sûr, sa propre parole, structurée, factuelle, posée. 

Votre rôle : l’aider à faire le tri et à évaluer ce qui est utile ou non. L’objectif n’est pas de “tout balancer”, mais d’apporter des éléments concrets, structurés, crédibles et en lien direct avec les faits reprochés. 

Rappelez-lui aussi que la qualité prime sur la quantité. Un seul élément pertinent peut suffire à faire pencher la balance, tandis qu’un élément mal choisi peut affaiblir l’ensemble du dossier. 

Et surtout, faites preuve de bon sens. C’est souvent le meilleur guide pour préparer un accompagnement efficace. 

Bonnes pratiques pour bien accompagner un salarié

Avant l’entretien 

Avant l’entretien, en tant qu’assistant du salarié, vous pouvez (et devez !) vérifier que la procédure engagée par l’employeur respecte bien le cadre légal. 

Voici quelques points de vigilance : 

  • les faits reprochés sont-ils intervenus dans les 2 mois précédant l'engagement de la procédure disciplinaire ? 
  • la convocation mentionne-t-elle bien la date, l’heure, le lieu, l’objet de l’entretien et la possibilité de se faire assister ? 
  • l'entretien est-il bien prévu en présentiel (et non par téléphone) ? 
  • est-ce que l’échange prévu est individuel ? Un entretien commun à plusieurs salariés est interdit. 
  • l'entretien aura-t-il lieu dans une langue compréhensible pour les deux parties ? 

Bon réflexe : demandez au salarié de vous transmettre la convocation avant l’entretien pour vérifier ensemble les points de forme. 

Enfin, préparez-vous aux échanges en vous informant sur les motifs de sanction envisagés. Cela vous aidera à mieux orienter votre accompagnement et à poser les bonnes questions. 

Pendant l’entretien 

Quelques bons réflexes à adopter pendant l’entretien : 

  • soyez ponctuel : votre crédibilité et celle du salarié en dépendent ; 
  • restez vigilant au respect des règles : l’employeur doit exposer précisément les motifs de la sanction envisagée. Si ce n’est pas clair, n’hésitez pas à demander des précisions ; 
  • assurez-vous que le salarié puisse s’expliquer : le fameux “échange contradictoire” ; 
  • encouragez un ton mesuré : 
  • rappelez au salarié que sa liberté d’expression a des limites (pas d’insultes, ni de diffamation). 

Après l’entretien 

1. Compte-rendu 

Après l’entretien, vous pouvez proposer un compte-rendu commun aux parties. Ce document n’est pas obligatoire, mais il peut servir à garder une trace écrite neutre du déroulé. 

Il pourra contenir : 

  • le déroulement de l'entretien ; 
  • les faits ; 
  • et le contenu des discussions.

Attention : le compte-rendu doit être validé par toutes les parties avant signature (tel le contenu du procès-verbal des réunions du CSE pour l’approbation ; sur ce sujet vous pouvez aller voir notre fiche guide Tout savoir sur le PV de réunion CSE). 

2. Points à vérifier après l’entretien 

  • l’employeur doit respecter un délai de réflexion de 2 jours ouvrables minimum avant toute décision ; 
  • la sanction doit être notifiée dans le mois qui suit l’entretien ; 
  • la lettre de sanction ou de licenciement doit contenir des faits précis et datés ;
  • en cas de licenciement, le salarié peut demander des précisions dans un délai de 15 jours (important !). 

En effet, dès que le salarié reçoit la lettre précisant la sanction, assurez-vous que celle-ci expose clairement les faits reprochés et la nature de la mesure prise. Il est essentiel que la lettre soit précise, factuelle et complète : elle doit notamment mentionner la date, le lieu et l’heure des faits. L’objectif est que le salarié puisse comprendre exactement ce qui lui est reproché, sans ambiguïté. 

3. Vérification à ne pas oublier 

Vérifiez que le règlement intérieur est bien affiché et accessible à tous. 

Il est obligatoire à partir de 50 salariés, mais il peut aussi exister dans les entreprises de moins de 50 salariés si l’employeur choisit de l’instaurer.

Dans tous les cas, s’il existe, il doit être porté à la connaissance des salariés. A défaut, il devient inopposable et les sanctions disciplinaires basées sur son contenu peuvent être contestées, voire annulées. Si l’employeur n’a pas respecté les formalités nécessaires à sa mise en place (comme par exemple vous consulter en tant que CSE), là aussi les sanctions peuvent être contestées.

4. Vérification de l’état du salarié 

Un salarié convoqué à un entretien préalable est souvent sous pression : stress, anxiété, culpabilité, sentiment d’injustice ou parfois effondrement émotionnel. Peu importe la gravité des faits reprochés, l’élu CSE a aussi un rôle d’alerte et de vigilance humaine. 

Même en cas de faute avérée, un salarié reste une personne. Il peut être profondément affecté par la procédure et ses conséquences. 

En tant qu’assistant, vous pouvez : 

  • évaluer à chaud l’état émotionnel du salarié à la sortie de l’entretien ; 
  • lui proposer un temps d’échange à part, en dehors du cadre strictement disciplinaire ; 
  • le réorienter si besoin : médecin du travail, service RH, psychologue du travail, assistante sociale, etc. ; 
  • prévenir si nécessaire un interlocuteur de confiance dans l’entreprise (avec l’accord du salarié). 

Important : certains salariés craquent après coup. Rester disponible ou proposer un contact de soutien peut éviter des situations dramatiques.

A rappeler au salarié : une sanction, même un licenciement, ne définit pas sa valeur en tant que personne. Il a le droit de se reconstruire, de rebondir et d’être soutenu ! 

Pièges à éviter pour le membre du CSE

Voici les principaux pièges dans lesquels un membre du CSE peut tomber, souvent de bonne foi, mais avec des effets contre-productifs. 

S’impliquer émotionnellement ou trop juridiquement 

Vous n’êtes ni l’avocat, ni le psy du salarié. 

Il est normal de ressentir de l’empathie, surtout si le salarié traverse une période difficile. Mais attention à ne pas vous laisser déborder par l’émotion : cela pourrait brouiller votre analyse et nuire à votre rôle d’assistant. 

A l’inverse, tomber dans une approche trop technique ou juridique peut aussi poser problème : si vous adoptez un ton trop formel ou procédural, cela peut couper la communication ou être mal perçu par l’employeur comme une tentative de “plaidoirie” déguisée. L’objectif n’est pas de braquer l’employeur, mais de créer un espace de dialogue clair, respectueux et équitable. 

Le bon dosage ? Une posture humaine et professionnelle. Vos meilleurs alliés : l’écoute, le recul, la clarté ! 

S’opposer frontalement à l’employeur 

Votre posture ne doit pas être conflictuelle ou combative. 

Un entretien préalable n’est pas un ring. Votre rôle n’est pas de “prendre le dessus” ou de “gagner” un débat contre l’employeur. 

Une attitude agressive ou trop vindicative peut : 

  • décrédibiliser le salarié que vous assistez ; 
  • bloquer toute possibilité d’échange ; 
  • et transformer un moment clé en affrontement inutile. 

Bien évidemment, si une irrégularité est manifeste, vous avez le droit d’intervenir et de poser des questions. Mais faites-le de manière posée, factuelle et sans provocation. 

L’objectif est de défendre les droits du salarié, pas déclencher une guerre d’ego. 

Parler à la place du salarié sans coordination

C’est un piège courant : vouloir bien faire et finir par parler pour le salarié, sans même s’en rendre compte. L’entretien est avant tout personnel. C’est au salarié de s’exprimer en son nom. 

En parlant à sa place, vous risquez : 

  • de brouiller son message ; 
  • de lui faire perdre la main ; 
  • de contredire ses propos sans le vouloir. 

La bonne pratique : coordonnez-vous en amont. Demandez-lui ce qu’il souhaite dire lui-même et ce qu’il vous autorise à compléter. 

Pendant l’entretien, prenez la parole uniquement pour : 

  • reformuler ses propos si besoin ; 
  • poser des questions complémentaires ; 
  • le soutenir s’il perd ses moyens. 

Vous êtes son appui, pas son porte-voix. 

Impacts réels de votre assistance

Prendre part à un entretien disciplinaire en tant que membre du CSE, ce n’est pas anodin. Vous intervenez dans un moment tendu, parfois douloureux, avec à la clé de vraies conséquences pour le salarié, mais aussi des effets concrets pour vous en tant qu’élu. 

Ce que cela change pour le salarié 

Votre présence à ses côtés n’est pas qu’un détail symbolique. 

Elle peut : 

  • réduire son stress, simplement parce qu’il n’est pas seul face à la hiérarchie ; 
  • apporter un soutien moral, notamment en cas de sentiment d’injustice ou d’incompréhension ; 
  • lui permettre de mieux comprendre la procédure grâce à vos explications et votre regard extérieur ; 
  • l’aider à rester mesuré et concentré, évitant ainsi des réactions émotionnelles, impulsives ou maladroites ; 
  • avoir un effet modérateur, car un tiers présent peut amener l’employeur à être plus rigoureux ou plus nuancé. 

Même sans changer le fond de la décision, votre accompagnement peut clairement faire la différence sur la forme et sur la façon dont le salarié vivra cet épisode de sa vie professionnelle. 

Les avantages pour l'assistant

Cet engagement vous permet de : 

  • renforcer la confiance des salariés envers leurs représentants ; 
  • développer des compétences précieuses, telles que l’écoute active, la médiation, l’analyse des faits et/ou la posture professionnelle ; 
  • être un témoin objectif, ce qui peut parfois prévenir des dérives dans le déroulement de l’entretien. 

Mais attention à ne pas vous méprendre sur votre rôle : 

  • vous ne pouvez pas empêcher une sanction ou infléchir une politique RH à vous seul ;
  •  vous ne remplacez ni un avocat, ni l’inspection du travail ; 
  • vous devez rester neutre, professionnel et mesuré, même si l’émotion est là. 

Votre rôle est essentiel mais cadré. Mieux vaut le jouer à fond que chercher à en faire trop au risque de desservir la cause. 

La reconnaissance de votre rôle par les collègues 

En accompagnant un salarié, vous agissez dans l’ombre, mais ce type d’intervention marque les esprits. 

En effet : 

  • elle renforce l’image d’un CSE proche, humain et utile ; 
  • elle crée du lien de confiance, non seulement avec le salarié concerné mais aussi autour de lui ; 
  • elle peut ouvrir la porte à d’autres sollicitations : demandes d’information, signalements, conseils,... Bref, à un dialogue social vivant ! 

Chaque accompagnement est une graine. Elle peut faire grandir la reconnaissance de votre mandat, renforcer votre légitimité et donner plus de sens à votre engagement. 

Soyons honnêtes : pour beaucoup, le CSE = les chèques cadeaux. Et si vous leur montriez que c’est bien plus que ça ? 

Conclusion

Accompagner un salarié dans un entretien disciplinaire, ce n’est pas simplement “être présent”. C’est incarner concrètement un certain esprit du dialogue social. C’est soutenir sans juger. C’est défendre sans agresser. Et c’est parfois faire toute la différence.

FAQ

1/ Est-ce que le membre du CSE peut parler à la place du salarié pendant l’entretien disciplinaire ? 

Non. Le rôle principal du membre du CSE est d’assister, pas de se substituer. Il peut aider à reformuler ou intervenir pour clarifier, mais c’est le salarié qui reste au centre de l’échange. 

2/ Le membre du CSE doit-il utiliser ses heures de délégation pour assister à l’entretien ? 

Pas obligatoirement. Le temps passé à l’entretien disciplinaire est considéré comme du temps de travail effectif. Il est rémunéré même sans utilisation des heures de délégation et ne peut pas entraîner de perte de salaire. Par contre pour les éventuels temps de rencontre avec le salarié afin de préparer l’entretien, là il faut bien utiliser les heures de délégation.

3/ Est-ce que l’entretien peut avoir lieu sans que le salarié soit accompagné ? 

Oui, mais le salarié doit être informé dans la convocation de cette possibilité. Il peut choisir d’être assisté par un membre du CSE ou non. L’employeur ne peut pas l’imposer ni l’interdire. 

4/ Est-ce que le membre du CSE a accès au dossier disciplinaire du salarié ? 

Non, pas automatiquement. Il peut demander à consulter certains éléments si le salarié l’y autorise, mais il n’a pas de droit d’accès direct aux pièces de l’employeur. 

5/ Que se passe-t-il si le salarié craque ou pleure pendant l’entretien ? 

Le membre du CSE peut demander une pause, proposer de reporter ou simplement faire preuve de soutien. Il peut aussi intervenir pour protéger le salarié si l’entretien devient trop agressif. 

6/ Le membre du CSE peut-il prendre des notes ou rédiger un compte rendu ? 

Oui, il peut prendre des notes et même rédiger un témoignage écrit à l’issue de l’entretien. Ce document peut servir en cas de litige ultérieur. 

7/  Un élu du CSE peut-il refuser d’assister un salarié à un entretien préalable ?

Oui. Un membre du CSE peut tout à fait refuser une demande d’assistance, notamment :

  • s’il ne se sent pas à l’aise avec la situation ;
  • s’il estime ne pas être en mesure d’assurer une posture neutre et professionnelle (par exemple en cas de conflit personnel ou de faits graves comme du harcèlement) ;
  • ou s’il est dans l’incapacité matérielle de se libérer.


Le salarié devra alors se tourner vers un autre élu ou un autre salarié de l’entreprise.

Quiz en 5 points

1/ Le membre du CSE peut être sanctionné pour avoir assisté un salarié en entretien disciplinaire. 

Faux. Il exerce un mandat protégé. Il ne peut pas être sanctionné pour avoir rempli ses fonctions. 

2/ Le salarié peut venir avec un membre du CSE sans prévenir l’employeur à l’avance. 

Vrai. Il peut se faire accompagner, même sans prévenir, tant qu’il s’agit d’un membre du personnel ou représentant désigné. 

3/ L’entretien disciplinaire peut avoir lieu 24 heures après la remise de la convocation. 

Faux. Il doit y avoir au moins 5 jours ouvrables entre la convocation et l’entretien. 

4/ Le membre du CSE peut poser des questions à l’employeur pendant l’entretien. 

Vrai. Il peut poser des questions, demander des précisions et défendre les intérêts du salarié, tant que cela reste respectueux.

5/ Si le salarié ne parle pas, l’entretien ne peut pas avoir lieu. 

Faux. L’entretien peut se dérouler même si le salarié reste silencieux.

Références

Code du travail, article L. 1232-4 (mission d'assistance et de conseil), L. 1332-2, L. 1232-6 et R. 1332-3 (les délais d’envoi de la lettre de sanction par l’employeur), L. 1235-2 (délai de 15 pour demander des précisions sur les motifs de la sanction) 

Cour de cassation, chambre sociale, 6 septembre 2023, pourvoi no 22-14.184 (le conseiller du salarié ne subit aucune perte de salaire pour le temps passé à l'entretien) 

Cour de cassation, chambre sociale, 28 novembre 2021, pourvoi n99-46.031 (licenciement sans 

cause réelle et sérieuse d’un salarié qui ne s’était pas présenté à l’entretien préalable) 

Cour de cassation, chambre sociale, 20 juin 2007, pourvoi no 06-41.823 (la présence de l'assistant de l’employeur ne doit pas être préjudiciable aux intérêts du salarié et détourner l'entretien de son 

objet) 

Cour de cassation, chambre sociale, 26 novembre 1996, pourvoi no 95-42.457 (l'existence de 

représentants du personnel s'apprécie au niveau de l'entreprise et non de l'établissement)

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