Commande publique : zoom sur les marchés publics
Il en existe plusieurs types (marchés de travaux, de fournitures et de services). Ces contrats spéciaux sont régis par le Code de la commande publique. Ils répondent à un régime spécifique, notamment en raison de la procédure parfois très lourde précédant leur signature. Cette procédure dite de passation rassemble des règles à la fois nationales et européennes, qui alourdissent les délais nécessaires à la mise en œuvre du marché public, mais garantissent une concurrence loyale entre les différents acteurs économiques.
Qu’est-ce qu’un marché public ? Pourquoi est-ce si différent des autres contrats ?
Si vous êtes une entité publique, le terme doit vous être familier, pourtant, personne ne vous en voudra de peiner à comprendre le droit des marchés publics. Les règles ont beaucoup évolué sous l’influence de la jurisprudence mais aussi de l'ordonnance de 2018 créant le Code de la commande publique (CCP).
Si vous êtes une entreprise privée prête à réaliser une prestation pour une entité publique, vous avez peut-être été surpris qu'un contrat classique ne soit pas envisagé. Parce que vous contractez avec l’administration, vous devez composer avec son droit spécial. Ainsi, au lieu de signer un simple contrat de prestation de service par exemple, vous vous retrouvez en face à face avec un véritable cauchemar juridique : le marché public. 😱
Devant l’appel d’offres, la mise en concurrence et toute la procédure de passation, vous vous retrouvez un peu perdu ? 😵💫
Pas de panique, votre juriste augmenté QiiRO vous explique ce qu’est le marché public afin de vous aider à y voir plus clair en la matière.
Qu’est-ce qu’un marché public ?
Commençons par le commencement et voyons d’abord ce que signifie l’expression “marché public”. Non, ce ne sont pas des halles !
La loi (article L. 1111-1 du Code de la commande publique), définit le marché public comme un contrat conclu entre des acheteurs soumis au CCP, et des opérateurs économiques, qui vise à répondre aux besoins des acheteurs en matière de travaux, de service ou de fournitures. Ce contrat est conclu en contrepartie d’un prix ou “tout équivalent”.
D’accord, mais concrètement, ça veut dire quoi ? 😬 En réalité, ce qui se dégage de cette définition, c'est un ensemble de critères qui permettent d’identifier le marché public.
Le critère formel
Le marché public est un contrat. “Euh, oui… logique”, nous direz-vous. Mais pas si logique que ça. En général, les marchés sont passés avec l’administration. Et la spécialité de l’administration, c’est de décider un peu toute seule comment les choses vont se passer. Pour cela, elle a recours à des actes dits “unilatéraux”. Le concept est simple : l'administration veut quelque chose, elle le met par écrit, ce quelque chose se réalise.😤
Avec la commande publique, c’est un peu différent. L'administration a besoin de quelque chose et elle ne peut pas l’obtenir simplement en exigeant. Ce serait trop facile sinon. Elle est donc obligée de passer un contrat. Pourquoi c’est important ? Parce que ce contrat est synallagmatique. C'est-à-dire que les deux parties ont des obligations et oui, y compris l'administration. Ah, ça devient intéressant, non ? 😏
⛔ Même en se fondant sur une loi, l’administration ne peut pas se procurer certaines prestations par un acte unilatéral, elle doit obligatoirement conclure un marché, un contrat.
☝D’ailleurs, pour bien protéger le cocontractant, il existe plusieurs règles qui s’assurent de l’engagement réciproque. Par exemple, lorsque le montant de la prestation atteint 25 000€ ou plus (hors taxes), le marché doit avoir un écrit signé par les parties (article R. 2112-1 du CCP).
🚨Attention 🚨 il existe des exceptions : par exemple, dans le cas d’un marché ayant pour objet une assistance général à caractère administratif, financier et technique, le marché doit produire un écrit, peu importe son montant.
Le critère organique (mot de juriste pour désigner les personnes parties au contrat)
Le marché public étant un contrat, il fait apparaître au moins deux parties : l’acheteur qui a un besoin et l’opérateur économique qui y répond.
L'acheteur est traditionnellement une personne publique. C’était du moins ce qu’on avait décidé en France. Vu ainsi, c’était plutôt simple, non ? Malheureusement, entre temps, l’Union européenne est venue mettre son nez dans le droit des marchés publics et comme elle agit au nom de grands principes comme l’égalité des chances, la libre concurrence, etc, on a eu du mal à lui dire de se mêler de ses affaires. Seulement, elle a tout compliqué ! 🤦♀️ Maintenant, on ne parle plus de personnes publiques d’un côté et de personnes privées de l’autre, mais de pouvoirs ou entités adjudicateurs et d’opérateurs économiques. Ça y est ? On vous a perdu ? Merci l’Europe, vraiment ! 😒😑
Dis comme ça, on vous l’accorde, ça ne fait pas rêver et on a l’impression de ne plus rien y comprendre. Heureusement, vos juristes préférés vous guident et surtout, vous expliquent tous ces termes barbares. 💆♀️
Le pouvoir adjudicateur et l’entité adjudicatrice
Premièrement, l’adjudicateur. C’est juste un mot un peu compliqué pour désigner l'acheteur. 🙄
La difficulté résulte du fait que maintenant, il peut s’agir d’acheteurs publics au sens classique comme l’Etat et les collectivités territoriales, mais aussi à d’autres entités. Par exemple, les établissements publics industriels et commerciaux, les groupements d’intérêt public, les sociétés d’économie mixte, les organismes privés de HLM, les associations financées par des pouvoirs publics, les caisses de sécurité sociale et les personnes publiques hors catégories comme la Banque de France par exemple.
Ça en fait du monde, n’est-ce pas ? Toutes ces personnes sont soumises au Code de la commande publique lorsqu’elles contractent pour répondre à un besoin, donc faîtes bien attention au moment de négocier un contrat à la qualité de la personne avec qui vous discutez. Vous risquez de vous retrouver obligés de passer par la commande publique !
L’opérateur économique
Encore un joli terme pour simplement désigner l’autre partie. Celle qui répond au besoin de l'administration. Concrètement, c’est l’entreprise qui va réaliser les travaux commandés, effectuer la prestation de service voulue ou livrer les fournitures demandées par l'administration. Il s’agit le plus généralement d’entreprises privées.
La finalité du marché
La finalité du marché englobe deux grands axes qui permettent d’identifier un marché public : la satisfaction d’un intérêt de l’acheteur et l’objet même du marché.
La satisfaction de l’intérêt
Le but d’un marché public est de satisfaire un besoin ou un intérêt économique, celui de l’acheteur (le pouvoir adjudicateur). C’est là que le droit français vient se différencier du droit de l’Union européenne : en droit européen, le critère du besoin de l'acheteur importe peu pour déterminer si le contrat est un marché public ou non. Or, en droit français, il est important que le marché réponde à un “besoin propre” de l’acheteur.
🤔 Pourquoi est-ce important ? Car c’est ce critère qui permet de différencier marché public et concession. Et ça, pourquoi c’est important ? Tout simplement parce qu’ils ne répondent pas aux mêmes règles du Code de la commande publique.
🤓Bon à savoir : les contrats de concession tendent plutôt à satisfaire les besoins des usagers d’un service ou d’un ouvrage public. Concrètement, la collectivité n’est pas le destinataire direct de la prestation retirée du contrat. Elle l’acquiert pour le compte des administrés.
🚨Attention 🚨 le besoin à satisfaire doit être déterminé de façon précise. En droit de l’UE, il est parfois question d’intérêt économique direct pour l'acheteur. La Cour de justice de l’Union européenne retient toutefois une conception très large des marchés, comprenant les prestations commandées pour le compte d’un tiers, ou dont le prix est supporté par un tiers. Aïe, on commence à vous donner la migraine…🤕 Pour faire simple, restons sur l’idée qu’il faut répondre à un intérêt.🥱
L’objet du marché
Le marché de travaux
🚧 Il s’agit du contrat par lequel l’acheteur commande des travaux immobiliers. Dans les textes européens, ce marché se définit par un contrat ayant pour objet l’exécution, ou la conception et l’exécution ou « la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d’un ouvrage répondant aux exigences fixées par le pouvoir adjudicateur qui exerce une influence déterminante sur sa nature ou sa conception » (directive européenne 2014/24, article 2, § 6). Les juristes passent donc par beaucoup de mots pour dire : construction. 🏗
Les marchés de fournitures
🚛 Cette fois, l'acheteur achète des produits ou des biens mobiliers. L'opérateur économique est donc un fournisseur. Pour résumer, le marché de fournitures concerne la prise en crédit-bail, l’achat, la location ou la location-vente de produits au sens de l’article L. 1111-3 du Code de la commande publique. 🚚
🚨Attention 🚨 certains travaux peuvent être prévus dans ce genre de contrat, mais il s’agit d’accessoires à l’objet principal. Le contrat ne sera pas requalifié en marché de travaux.
Les marchés de service
⚖ Le marché de service a pour objet la réalisation de prestations de service selon le Code de la commande publique. Il n’y a pas de définition de prestation de service dans la loi mais jusqu’en 2015, elle distinguait les services prioritaires (qui nécessitent des procédures formalisées en fonction des montants) et les services non prioritaires qui, quel que soit le montant, bénéficient d’une procédure adaptée. 💻
Cette distinction est abandonnée depuis la naissance du Code de la commande publique.
Les marchés publics mixtes
Alors qu’ils relèvent du droit commun des marchés publics, certaines règles spéciales s’appliquent à ces marchés. En cas de “dissociabilité des besoins” (oui encore un terme compliqué mais ne vous inquiétez pas, QiiRO va tout vous expliquer), le marché est soumis aux règles juridiques les plus contraignantes de la Commande publique.
🧠 Petit point explication : Qu’est-ce que la dissociabilité des besoins ?
Globalement, le marché répond à au moins deux besoins qui sont… objectivement dissociables. D’accord, réutiliser les termes autrement ne facilite pas la compréhension néanmoins, il s’agit du critère tel que retenu par la loi et la jurisprudence. Donc, concrètement, ça veut dire quoi ? 🙄
Pour faire simple (ou à peu près simple), il n’existe que quatre hypothèses de marchés publics mixtes. Alors accrochez-vous, ça devient technique !
- Lorsque le contrat est conclu pour satisfaire des besoins relevant d’une part du droit commun des marchés classiques ou des marchés de partenariat, et d’autre part du régime particulier prévu au livre V du Code de la commande publique (autres marchés publics) ou aux autres contrats de concession (Livre II, partie 3). Si les besoins sont dissociables : le marché est soumis au droit commun des marchés publics. S’ils sont indissociables, il est soumis aux dispositions applicables à son objet principal (qu’il faut donc identifier). Si l’objet n’est pas identifiable, le contrat répond au droit commun des marchés publics.
- Si le contrat porte à la fois sur des prestations relevant de la partie “marchés publics” du Code de la commande publique et des prestations spéciales prévues à l’article L. 2515-1 du même Code (marchés de défense ou de sécurité), il répond au régime juridique des “autres marchés” prévu au livre V de la partie “marchés publics”, si les conditions de passation d’un contrat unique sont justifiées.
- De manière générale, des prestations de défense ou sécurité combinées à d’autres types de prestation.
- Le marché répondant au besoin de l’acheteur à la fois au titre de ses activités de pouvoir adjudicateur et d’entité adjudicatrice. Il faut alors identifier le besoin principal et s’il répond aux activités d’entité adjudicatrice, appliquer le régime pour les entités, s’il répond aux besoins du pouvoir, le régime du pouvoir adjudicateur.
Pourquoi savoir qu’il s’agit de marchés publics mixtes est pertinent ? Car le régime juridique étant différent pour chaque marché, la question se pose naturellement de savoir quelles sont les règles applicables lorsque le marché est mixte.
Le critère financier
💵Le critère d'onérosité correspond à la rémunération du titulaire du marché public. L’article L. 2 du Code de la commande publique y fait référence, il s’agit d’un critère du marché public. L’onérosité prend la forme d’un prix ou de tout équivalent, ce qui est très large. Par exemple, il peut s’agir d’une compensation en nature, d’une exonération de charges… 💶
Bon à savoir 👩🏫 le prix, lorsqu’il s’agit d’une somme versée, peut être constitué d’une part fixe et d’une part variable en fonction de résultats d’exploitation, à condition que cette dernière ne soit pas substantielle.
Prenons un petit exemple : un contrat de mobilier urbain. Le titulaire du contrat qui était autorisé à occuper un domaine public, s’est engagé à financer des équipements sur la voirie. Sa rémunération correspond à un droit d’exploitation du mobilier à des fins publicitaires. En se référant aux critères que nous avons énoncés, ce contrat n’est pas un marché public. Pourquoi ? Car il ne comporte pas de versement de prix réel et expose le titulaire aux aléas économiques et aucune prise en charge des pertes éventuelles par la personne publique ne vient compenser le risque. Il s’agit d’un contrat de concession, pas d’un marché public (solution dégagée et explicitée par l’arrêt Ville de Paris, rendu par le Conseil d’Etat le 18 septembre 2017).
Le contenu du marché
Certaines clauses sont obligatoires, d’autres facultatives mais en pratique, elles apparaissent dans tous les marchés publics :
- L’identification des parties (évidemment) ;
- La justification de la personne signataire au nom de l’acheteur (souvent personne morale de droit public) ;
- La nature et l’étendue des besoins (préalablement définis avec précision lors de l’appel d’offre) ;
- Les conditions d’exécution (clause obligatoire) : les conditions d’exécution doivent apparaître de manière précise, et surtout, être liées à l’objet du marché. Sauf exception, l’acheteur doit prévoir les conditions d’exécution du marché en considérant plusieurs domaines, notamment social, environnemental… (En 2026 au plus tard, ces considérations seront obligatoires sauf exceptions, la loi est déjà votée et entrera en vigueur d’ici 4 ans) ;
- La référence aux documents généraux cahiers des charges (CCAG, CCTG…) et particuliers (MI, PI, TIC…) ;
- Les modalités de calcul et la périodicité de la clause de révision du prix, le cas échéant (article R. 2112-13 du CCP) ;
- Le versement de l’avance : condition et taux + modalités de remboursement ;
- Les pièces relatives au marché : ordre de priorité des différents documents juridiques relatifs au marché ;
- Le prix du marché, les modalités et le délais de paiement ;
- La durée d’exécution et les dates de début (même s’ils ne sont pas fixés précisément, il est préférable de mettre une date prévisionnelle) ;
- Les conditions de réception des biens, de livraison des travaux ou d’acceptation des prestations ;
- La clause de résiliation conformément aux dispositions du CCP ;
- La désignation d’un comptable assignataire le cas échéant ;
- La référence aux articles et alinéas du code en application desquels le marché est passé ;
- La date de notification du marché ;
- La clause de réexamen : l’article R. 2194-1 du CCP prévoit la modification d’un marché (le montant, la variation des prix, des options…)
La procédure de passation des marchés publics
🚨Attention 🚨les marchés publics sont des contrats ultra spéciaux. D’abord, ils dérogent au droit commun des contrats car il s’agit de contrats publics, régis donc par le droit public. Ensuite, dans le droit des contrats publics, les marchés publics sont des contrats spéciaux. Ils sont, par conséquent, soumis à des règles précises en termes de procédure, notamment. En ce sens, ils répondent à une condition de validité qui leur est propre : la procédure de passation.
En effet, l’article L. 3 du Code de la commande publique dispose que les acheteurs doivent respecter le principe d’égalité lors de l’attribution d’un contrat de la commande publique. Ce principe à pour but de garantir l’efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics, et implique la mise en œuvre d’une procédure de passation.
Ainsi, la passation d’un marché tourne autour de trois grands principes :
- Le libre accès à la commande publique ;
- L’égalité de traitement des candidats au marché ;
- La transparence des procédures.
📍 Il revient donc à l’acheteur de prendre des mesures de publicité et d’information visant à respecter ces principes. L’ampleur de ces mesures varie en fonction du type de marché (travaux, service, fournitures), de l’acheteur ainsi que du montant du marché. Des seuils européens ont été fixés, permettant d’encadrer la sévérité de la procédure, allant de la simple mise en concurrence loyale à la publication nationale voire européenne (dans le journal officiel de l’Union européenne).
Par exemple, en dessous de 40 000 euros, aucune mesure de publicité n’est nécessaire, quel que soit le type de marché. Entre 40 000 et 89 999,99 euros, la procédure de publicité est adaptée, l'acheteur reste plus ou moins libre. Ensuite, les montants varient :
- Entre 100 000 et 5 381 999 euros, les marchés de travaux font l’objet d'une publicité formalisée au Bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP) ou au Journal d’annonce légales (JAL). Au-delà, ils doivent être publiés au BOAMP et au journal officiel de l'Union européenne (JOUE).
- Entre 90 000 euros et 139 999,99, les marchés de fourniture et de services passés par l’Etat et les établissements publics administratifs nationaux doivent être publiés au BOAMP ou au JAL, au delà au JAL et au JOUE,
- Entre 90 000 euros et 214 999,99 euros, les Marché de fournitures et de services passés par les Collectivités Territoriales et leurs établissements sont publiés au BOAMP ou au JAL, au-delà au BOAMP et au JOUE.
Ensuite, une mise en concurrence doit être effectuée. Le choix des candidats ne se fait pas arbitrairement !
❗Attention ❗ Si la procédure de passation n’est pas respectée, votre marché peut être annulé ! C’est pourquoi il est très important de vous renseigner auprès d’un juriste expert en la matière avant de vous lancer dans un marché public afin de vous assurer que vous suivez la bonne procédure.
Heureusement, votre juriste augmenté QiiRO peut vous accompagner dans la conclusion d’un marché public et vous expliquer la procédure de passation nécessaire à la validité de votre contrat !